Le passé migratoire comme tremplin pour le développement de l’identité
Des psychologues comparent le processus d’immigration avec le processus de deuil. En effet, l’immigration est vécue comme un profond déracinement, même lorsqu’elle est planifiée et volontaire. Pour les personnes qui quittent leur pays d’origine en raison d’une guerre ou d’un bouleversement quelconque, l’aventure peut se révéler particulièrement traumatisante. Indépendamment des circonstances, les personnes immigrées de tout âge tendent à s’ajuster à leur nouvelle vie en suivant une série d’étapes relativement prévisibles. Au sein d’une même famille, les frères, les sœurs et les adultes de différentes générations vivront ces étapes selon leur propre rythme et auront des réactions différentes en fonction d’une série de facteurs : la connaissance de la langue du pays d’accueil, la capacité de s’intégrer socialement, les interactions avec les membres de la communauté et la réussite professionnelle ou scolaire ou non.
Diverses racines, diverses voix, p. 17
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Le passé migratoire comme tremplin pour le développement de l’identité
« Il y a une autre différence, une autre grande différence. Dans certains pays d’Afrique, les enfants, on ne les met pas dans les classes selon leur âge, mais c’est plutôt selon leur capacité de comprendre la matière de cette classe. Là, vous allez trouver un enfant de 12 ans qui est en 3e année ou en 4e année, parce que son niveau ne lui permet pas d’être en 6e pour un enfant de cet âge-là. Quand cet enfant arrive ici, il devrait être en 3e, d’où il est venu, il était en 3e année. Ici, étant donné qu’il a 10 ans, étant donné qu’il a 17 ans, on doit directement le mettre en 3e ou en 4e ou en 7e alors que cet enfant n’a pas ce niveau-là. L’enseignant du PANA peut bien faire son travail, l’enseignant peut bien le comprendre, mais l’ambiance des autres élèves qui vont rire de lui “Eh! il ne sait rien, eh! il ne connaît rien”, toute cette ambiance-là peut encore bloquer cet enfant. »
Jacques Lehani, travailleur d’établissement dans les écoles (TÉÉ)
Centre communautaire francophone Windsor-Essex-Kent
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Le passé migratoire comme tremplin pour le développement de l’identité
« Malheureusement, dans certains pays, les personnes d’autorité, genre les policiers, les pompiers, ne sont pas nécessairement de bonnes personnes pour les jeunes. Ici, nous, on sensibilise les jeunes, on fait, genre, c’est une journée d’Aidants communautaires. On passe à travers toutes les différentes personnes qui peuvent nous aider dans la communauté. On est chanceux qu’on a une bonne relation avec les services de police. Ils viennent faire des présentations, je dirais à peu près à chaque trois mois, aux jeunes sur différents sujets. »
Valérie Hodgins, gérante des programmes communautaires et subventionnés
Centre communautaire de Windsor-Essex-Kent.
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Le passé migratoire comme tremplin pour le développement de l’identité
« Un conseil que je donnerais à un enseignant ou à une enseignante qui accueille une élève nouvellement arrivée ou un élève nouvellement arrivé, en me basant sur ma propre expérience, le premier élément, c’est la patience. Sans patience, on risque de craquer, parce qu’il y a souvent un choc culturel. Souvent, on a tendance à juger ces élèves, ces enfants qui viennent d’arriver, qui ont leur culture, à partir de notre propre culture. Donc premier élément, patience. Un autre élément, c’est juste cette attitude d’inclusion, être inclusif. Et je le ferais avec tous les autres élèves. Mais, avec ces élèves-là en particulier, je conseillerais la patience. Je conseillerais d’avoir ce caractère inclusif et aussi l’équité. Vraiment, les trois éléments m’ont beaucoup aidé. La patience me permet d’attendre, elle me permet d’accompagner. La patience ne peut pas se faire sans l’empathie. »
Boniface Mukendi, enseignant du PANA
École élémentaire catholique Saint-Edmond, CSC Providence
Le passé migratoire comme tremplin pour le développement de l’identité
« Et d’un autre côté, j’ai pu entendre : “Moi, madame, j’marchais beaucoup pour aller à l’école, j’ai été vraiment étonné que je pouvais prendre l’autobus. Moi au Canada, j’aime ça madame, parce qu’il n’y a pas de morts sur le bord de la route, il n’y a pas eu de tuerie.” C’est là qu’on prend le temps de réaliser que “O.K., il ne faut pas que j’enseigne tout de suite mon français ni les mathématiques. L’enfant a quelque chose à me transmettre. Nous, on doit se souvenir que ce sont des citoyens. On doit les amener à être de bons citoyens. Oui, on doit respecter leur vécu, c’est certain, mais on doit leur démontrer qu’ici tu as le droit.” »
Roxane Bouvier-Grégoire, enseignante ALF/PANA
École élémentaire catholique Saint-François-d’Assise, CECCE
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Le passé migratoire comme tremplin pour le développement de l’identité
« Nous devons toujours, toujours nous rappeler que ces enfants viennent, la majorité viennent des camps de réfugiés. La majorité ont des histoires différentes, la majorité ont vécu aussi des choses incroyables que vous et moi ne pouvons vraiment pas imaginer. Alors ils ont du mal à partager. Alors, si vous ne travaillez pas ceci, vous ne pourrez pas travailler avec ces élèves, c’est important. Et des fois, vous allez les voir en action, ce n’est pas qu’ils sont méchants. Une personne, qui elle a besoin de colorier, par exemple, elle a besoin du crayon de couleur bleu. Elle va tout prendre à la main pour que les autres n'en prennent pas. Ce n’est pas pour être méchant, moi j’ai constaté c’est juste qu’ils n’ont pas eu l’habitude de voir les choses là, devant eux. [Lors d’une chasse aux œufs, je n’ai pas voulu dire d’où venaient les œufs. Deux élèves en parlaient.] Un dit à l’autre : “Tu te rappelles les avions qui jetaient la nourriture dans les camps de réfugiés?” Alors là quand j’ai entendu, j’ai dit : “Ô mon Dieu!” Je les ai laissé parler et puis l’autre a dit : “Ah oui! Je me rappelle.” Il fallait les voir en action, ce jour-là, ce matin-là. Nous sommes sortis pour ramasser les œufs que j’avais déjà cachés. Ils couraient. C’est ça la survie, c’est la même chose. J’ai ceci, je ne suis pas sûr que je l’aurai demain, donc pourquoi ne pas le garder. »
Angèle Molima, enseignante
École élémentaire catholique Saint-Edmond, CSC Providence
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Le passé migratoire comme tremplin pour le développement de l’identité
« Nous, notre approche pédagogique en Ontario vise à amener l’élève à réfléchir. On lance des questions et on leur demande : “Qu’est-ce que t’en penses? Donne-moi ton opinion.” Et pour ces élèves nouvellement arrivées et arrivés, donner leur opinion, valider leurs connaissances, aller en profondeur, c’est complètement du nouveau. J’ai l’impression que cet échange-là ne se faisait pas. Les interactions verbales aussi : parler entre camarades, parler de leurs apprentissages, ça aussi ça semble être un défi. Lorsqu’on dit aux élèves : “Oui, oui, t’as le droit de parler à ton camarade! Explique-lui le pourquoi.”, ils sont vraiment, vraiment étonnés. Lever la main pour dire : “Moi, je ne comprends pas, moi je comprends”, ça aussi c’est un défi. Il faut leur dire : “Tu as le droit de ne pas comprendre, tu ne seras pas pénalisé.” »
Roxane Bouvier-Grégoire, enseignante ALF/PANA
École élémentaire catholique Saint-François-d’Assise, CECCE
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